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Le syndrome du survivant
Suite à un événement traumatisant ayant entraîné la mort de plusieurs personnes, les blessés psychiques décrivent un intense sentiment de culpabilité. Cette réaction psychologique porte un nom : "le syndrome du survivant". Au chevet des rescapés du Bataclan et de certaines catastrophes naturelles, Hélène Romano, docteure en psychopathologie à Paris, livre son éclairage à travers son expérience.
- Le syndrome du survivant : c’est quoi ?
- Les causes du syndrome du survivant
- Syndrome du survivant : quels sont les troubles associés ?
- Qui est concerné par le syndrome du survivant ?
- La culpabilité lors d’un événement traumatique
- Le syndrome du survivant : quel traitement ?
- Quel est le rôle de l’entourage dans le traitement du syndrome du survivant?
Le syndrome du survivant : c’est quoi ?
Hélène Romano : Le syndrome du survivant est une réaction psychologique touchant les personnes ayant été exposées à un événement au cours duquel il y a eu des morts. Ces personnes ont failli mourir et elles ont survécu.
Ces survivants expriment une culpabilité intense :
- Soit ils estiment qu’ils auraient dû être à la place du mort,
- Soit ils pensent qu’ils auraient dû empêcher la mort de l’autre.
Des parents ont donné leurs billets d’avion à leurs enfants. Ces derniers sont décédés dans le crash de celui-ci. Dans ce cas précis, les parents n’éprouvent pas le "syndrome du survivant" car ils n’ont pas été confrontés directement à la mort. Pour une personne qui a loupé son train et qui va éviter l’accident mortel de ce dernier, le sentiment de culpabilité va être plus distancié. Elle ne sera pas de la même intensité que les personnes ayant été sous des victimes au Bataclan, par exemple.
Entre les personnes qui ont été confrontées directement à la mort et ceux qui ont évité d’assister à l’événement, la prise en charge est différente.
Les causes du syndrome du survivant
Hélène Romano : Les événements les plus souvent associés au syndrome du survivant sont :
- Les accidents de la voie publique,
- Les attentats (statistiquement moins fréquents).
Dès qu’il y a au moins un mort dans un événement tragique collectif, il existe une très forte culpabilité dans sa forme projective.
Syndrome du survivant : quels sont les troubles associés ?
Hélène Romano : Pour éprouver le syndrome du survivant, il faut avoir été témoin d’un événement mortel et avoir survécu. Chez le blessé psychique, une intense culpabilité va persister et l’empêcher de vivre. Il se sent coupable de vivre et n’arrivera pas à exister par lui-même. Les personnes qui ont des troubles traumatiques ne sont pas soulagées d’être en vie. Souvent des troubles dépressifs apparaissent.
Soit la personne arrive à verbaliser, soit il va développer des conduites d’échec ou des comportements addictifs comme l’usage de drogues. C’est un vrai danger car la consommation de drogues crée une mise à distance avec le réel et permet l’évitement.
Qui est concerné par le syndrome du survivant ?
Hélène Romano : Il n’y a pas d’études qualitatives à ce sujet. Ce que l’on sait c’est que :
- L’âge, l’état développemental et les traumatismes antérieurs vont rentrer en ligne de compte.
- Le contexte de l’événement joue un rôle important.
- L’événement lui-même a une fonction considérable dans le trouble "traumatogène".
Par exemple, le blessé psychique ne va pas avoir le même ressenti s’il a été touché par une balle perdue ou ciblée directement sur lui. De même, lors d’un tsunami, une petite fille a essayé de tendre la main à son père. Lui est décédé, elle non. Elle s’en est voulu. Si elle l’avait perdu de vue tout de suite, son ressenti n’aurait pas été le même.
Après l’événement, les blessés sont souvent submergés par l’incompréhension des proches. Certains disent "si tu as survécu, il faut que tu vives pour les morts". Un fardeau supplémentaire à porter lors de leur reconstruction.
La prise en charge tient compte des ressources du blessé avant, au moment et après l’événement. Les blessés qui parviennent à se reconstruire plus facilement sont ceux qui se sentent protégés et qui ne se sentent pas seuls au monde. Ils sont reconnus en tant que sujets. Les enfants et les personnes isolées sont les plus fragiles.
La culpabilité lors d’un événement traumatique
Hélène Romano : La culpabilité est liée aux cultures judéo-chrétiennes. La notion de faute y est très ancrée. Quelqu’un qui se sent coupable depuis toujours ne se sentira pas valorisé et n’aura d’estime de lui-même. Le poids de la culpabilité va donc dépendre de l’histoire personnelle.
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