Le sevrage sortir de l alcoolisme

By: Astolpho Frappier

Sevrage de l’alcoolisme : comment sortir de l’alcoolisme ?

Il est difficile d’aborder le sevrage de l’alcool pour un sujet dépendant. Le patient alcoolique n’aborde que très rarement directement le problème. Le sevrage est souvent pressenti comme une période plus difficile encore que la dépendance. C’est pourquoi la consultation du médecin de famille revêt une importance particulière.

  1. Une première étape : la prise de conscience
  2. Comment aider un alcoolique ?
  3. Peut-on commencer par diminuer l’alcool ?
  4. Alcoolisme, dépression et anxiété
  5. Les nouveaux traitements médicamenteux
  6. Un suivi psychologique fondamental

Une première étape : la prise de conscience

Diverses stratégies peuvent être utilisées pour faciliter la prise de conscience du sujet dépendant. Un contrôle sanguin banal peut être un prétexte pour l’évoquer. On peut également partir des habitudes alimentaires, des problèmes ressentis par le sujet (insomnie, impuissance. ).

Les complications potentielles sont, pour certains, l’occasion de prendre conscience des risques de leur conduite d’alcoolisation. La survenue d’un événement "grave" (conduite en état d’ivresse et accident mortel, accès de violence incontrôlable. ) sont déterminants pour la volonté du patient.

L’écoute et le suivi ont une importance considérable dans la prise en charge, alors que les prescriptions médicamenteuses, elles, ne sont qu’adjuvantes.

En tout cas, quelle que soit la modalité de la prise de conscience, c’est le sujet lui-même qui doit pouvoir envisager son propre sevrage. Cette condition est une étape incontournable, pour réussir. Reconnaître sa dépendance à l’alcool est une première étape qui peut prendre du temps. Pour sortir de l’alcoolisme, il faut apprendre à changer de vie et souvent modifier son rapport aux autres et donc être prêt à le faire et avoir conscience qu’il y a un problème.

Comment aider un alcoolique ?

Le rôle du médecin de famille

Dans la plupart des cas, le sujet ne verbalise ni sa perte de contrôle par rapport à l’ingestion d’alcool ni sa souffrance (ou celles de ses proches).

  • Dans un premier temps, le médecin évalue le rapport entre les troubles observés et la consommation d’alcool ;
  • Ensuite, il informe le patient de la relation entre les troubles observés et la pathologie dépistée, de l’évolution possible si la consommation est stoppée ou et des risques que le patient encourt s’il continue à boire.

Tous les anciens buveurs racontent avoir eu une attitude très méfiante de "déni" dans leur première rencontre avec le médecin, qui consiste à ne pas évoquer le sujet de front, car au début, tout est prétexte à se voiler la face.

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Le rôle de l’entourage

L’entourage est en position difficile, car il ne doit être ni complice ni moralisateur. Il se doit d’être ferme par rapport à la décision du patient d’entamer un sevrage. Son écoute, sa compréhension et son soutien sont primordiaux, mais ne doivent surtout pas infantiliser le sujet alcoolique.

Le conjoint du malade alcoolique demande souvent à être aussi pris en charge, car l’alcool modifie la vie du couple : le conjoint est devenu progressivement dépendant du sujet qui boit, lui-même dépendant de l’alcool. C’est une vie de couple à 3 qui s’est peu à peu installée. Le conjoint devient progressivement obnubilé par l’alcool, qui pernicieusement instaure un climat d’insécurité et d’incertitude. La culpabilité, la perte de confiance en soi puis l’impossibilité d’agir s’installent.

Parfois, seul le conjoint, pris dans une spirale qu’il ne maîtrise pas, est demandeur. Sa souffrance est devenue intolérable. En l’écoutant, en lui expliquant la maladie alcoolique, certes sans minimiser la situation, le médecin doit amener le conjoint à reconsidérer son partenaire, à réfléchir aux liens qui les unissaient sans l’alcool et à leur vie de couple. Moins enfermé dans sa seule identité de malade, l’alcoolique changera peut-être d’attitude.

Il vaut mieux que chacun soit pris en charge par une personne différente. Si le médecin de famille prend en charge les 2 personnes, il doit clairement et dès le départ respecter une stricte neutralité et poser le cadre des rencontres afin de mieux gérer les périodes de crise, de découragement.

Le sevrage alcoolique chez un patient dépendant de l’alcool est une étape importante et longue dans le parcours de sa maladie. Pour que l’abstinence soit durable, l’accompagnement (médical, psychologique et familial) doit s’inscrire dans la durée.

Peut-on commencer par diminuer l’alcool ?

Pour sortir de l’alcoolisme, on a longtemps préconisé le sevrage et l’abstinence totale. Aujourd’hui, certains professionnels proposent un accompagnement pour aider leur patient à réduire leur consommation d’alcool. Apprendre à gérer son rapport à l’alcool peut s’envisager comme une transition vers un arrêt total ou au contraire être un objectif à maintenir à vie. Bien sûr, cette méthode ne peut s’envisager qu’en concertation avec un professionnel de santé qui aura préalablement établi un bilan sur le plan médical et psychologique.

Mais cette diminution peut aussi être difficile à maintenir au long cours. En effet, toujours chercher à contrôler sa consommation d’alcool, l’inquiétude de dépasser la limite, peut prendre beaucoup de place dans la tête du patient, qui préférera parfois finalement tout arrêter.

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Alcoolisme, dépression et anxiété

L’abord psychologique est déterminant lors de la prise en charge d’un sujet alcoolique. Certaines études estiment que, pour 90 % des sujets alcooliques, lorsque dépression et alcoolisme surviennent simultanément, l’alcoolisme est le diagnostic principal. Par ailleurs, l’anxiété est fréquemment associée à l’alcoolisme (l’alcool est un anxiolytique bien connu).

Ainsi, les médicaments prescrits regroupent les anxiolytiques, surtout les benzodiazépines, mais aussi les carbamates, les antidépresseurs parfois, les médicaments à effet antabuse (c’est-à-dire qui dégoûtent de l’alcool lorsqu’ils sont conjugués à son absorption), par exemple le disulfirame, l’acamprosate, le naltrexone, le lithium. D’autres médicaments sont actuellement à l’étude.

Associés à une bonne hydratation et une vitaminothérapie, ils sont un complément du suivi psychologique. Mais l’observance (le bon suivi) du traitement, seule, ne garantit pas toujours la réussite du sevrage.

Les nouveaux traitements médicamenteux

Le nalméfène

Le nalméfène agit sur le système de récompense et diminue l’envie irrépressible de boire. Son but est de réduire la consommation d’alcool. Il doit être pris ponctuellement lorsque le patient anticipe une envie de boire. Il a reçu une autorisation européenne de mise sur le marché en 2013 et est remboursé par la sécurité sociale depuis 2014.

Le baclofène

À l’origine, le baclofène est un médicament indiqué dans le traitement des contractures musculaires d’origine neurologique. Depuis quelques années, de nombreuses études ont prouvé qu’en augmentant les doses habituellement prescrites (jusqu’à 300 mg/jour), ce médicament agit sur la libération de la dopamine et diminue le plaisir lié à la consommation d’alcool. Il rendrait donc indifférent aux boissons alcoolisées, permettant ainsi de diminuer sa consommation voire même de l’arrêter. Utilisé par de nombreux patients, cette utilisation s’est démocratisée sans pour autant que le baclofène n’ait d’autorisation de mise sur le marché pour traiter l’alcoolisme.

  • En 2014, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) avait accordé une recommandation temporaire d’utilisation (RTU) qui encadre les conditions d’utilisation ;
  • En octobre 2018, la spécialité Baclocur® a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le traitement de l’alcoolo-dépendance. La Recommandation Temporaire d’Utilisation (RTU) est prolongée jusqu’à la commercialisation effective de la spécialité Baclocur® (a priori fin 2019).

En juillet 2017, une étude menée par l’ANSM, l’Assurance Maladie et l’INSERM a montré qu’une utilisation à haute dose (surtout au-dessus de 180 mg/jour) était associée à un risque accru d’hospitalisations et de décès par rapport aux autres traitements. L’ANSM a donc décidé de limiter la dose à 80 mg/jour.

L’oxybate de sodium

L’oxybate de sodium (Xyrem®) est à l’origine utilisé pour traiter les troubles chroniques du sommeil. Il agit sur la libération de la dopamine. Son mécanisme d’action laisse penser qu’il pourrait avoir un intérêt dans le maintien de l’abstinence et la prévention du syndrome de sevrage. Pour l’instant, les études menées ne permettent pas d’évaluer le rapport entre les bénéfices et les risques de cette molécule.

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Un suivi psychologique fondamental

Lors de la consultation, un soutien psychologique peut être proposé. Qu’elle soit assurée par le médecin généraliste, par un psychiatre ou un psychologue, l’aide psychologique est fondamentale.

Elle permet d’analyser la relation de l’individu à l’alcool, relation qui n’est jamais identique d’une personne à l’autre. La première étape consiste à faire comprendre au sujet que la situation peut évoluer pour permettre en quelque sorte de le libérer. Elle permet aussi d’entamer un dialogue, difficile, avec l’entourage.

  • Le sevrage est souvent proposé en première intention en ambulatoire : le sujet n’est pas hospitalisé mais est suivi par son médecin de famille ou bien par le médecin d’un Centre d’Hygiène Alimentaire et Alcoologie, s’il y en a un près de son domicile ;
  • Si le patient accepte (ce n’est jamais son entourage qui décide à sa place) et que l’indication médicale est posée, une hospitalisation peut être proposée en unité spécialisée. On parle alors de sevrage "résidentiel". L’hospitalisation est notamment préférable lorsque le sevrage est dangereux à domicile (alcoolo-dépendance importante, épilepsie ou autres complications connues) ou si le sevrage en ambulatoire a échoué ou si le sujet a rechuté.

Parfois l’intensité des manifestations dépressives et anxieuses peut imposer une hospitalisation, et ce d’autant qu’il existe une poly-intoxication (ingestion d’autres drogues, médicaments ou cocaïne. ). On préconise également une hospitalisation si une rupture est nécessaire avec un milieu familial lui-même touché par l’alcool ou si l’entourage familial du patient est inexistant.

Après le sevrage, il faudra apprendre à retrouver une vie harmonieuse, sans alcool sur la durée. C’est ce qu’on appelle la phase de consolidation.

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